Un combat passionné contre les maux

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Il évoque son métier avec flamme, ses mots racontent un métier au-delà des apparences. Loïc Rausenberger est le kiné du tournoi. Assisté de trois étudiants en école de kinésithérapie, il doit répondre aux attentes des athlètes engagés sur le Master U. Non seulement ils s’occupent de soigner les maux, mais il prend également soin des mots derrière lesquels se cachent parfois des douleurs plus profondes.

« Je ne fais aucune différence entre mes différents patients, que ce soit dans mon cabinet ou dans le sport de compétition ». Lorsqu’on lui pose la question si la prise en charge diffère entre les sportifs de haut niveau et les sportifs universitaires, la réponse de Loïc Rausenberger ne transpire aucun doute. C’est d’abord par passion qu’il a choisi de s’investir en kiné du sport : « Lorsque j’ai validé mon diplôme à l’Université de Charleroi, j’avais déjà suivi plusieurs formations en kinésithérapie du sport. Juste après, je suis devenu kiné bénévole au club de gymnastique de ma ville, Faches-Thumesnil. Ce sport est tellement traumatisant pour les corps que j’ai pu me faire la main sur des pathologies très variées. ». Grâce à cette ligne de plus sur son CV, Loïc a obtenu le poste de kiné au Lille Métropole Basket Club (LMBC), alors en Nationale 3. Après deux années très instructives, lors desquelles il a pu voir comment exercer son métier avec un groupe entier sur plusieurs saisons, il est embauché par le Racing Club de Lens. Las, les déboires sportifs du club ne lui ont pas permis de s’inscrire dans la durée dans ce qui constituait à l’époque son premier contact avec le haut niveau. Dès lors, il confirme son savoir-faire et écume les parquets de France (le LMBC donc, mais aussi Orchies Basket ou des vacations au Hainaut Volley Club) ou de la Belgique voisine (les Spirous de Charleroi en pro A belge). Toujours dans cette recherche constante d’expériences et de progression, il intervient depuis plusieurs années dans des tournois de tennis de haut niveau, dont le Master U BNP Paribas. Pour l’occasion, il travaille de concert avec le médecin du tournoi, mais aussi des élèves en kiné avec qui il estime « être en compagnonnage. Plus que de maître à élèves, je préfère l’échange entre pairs et c’est comme ça que je l’envisage avec eux. Ils rentrent dans le vif du sujet : les bouquins, c’est bien, mais rien ne vaut la pratique. Transmettre ma passion, c’est ça l’intérêt de l’exercice ! »

Un protocole bien précis à suivre

Leur principale tâche est d’intervenir sur les soucis et autres bobos d’après match : ce peut être la pose d’un strap ou une épaule endolorie qu’il doit manipuler : le dialogue qu’il instaure pour comprendre la douleur de l’athlète lui assure sa confiance.  Car, en plus de la kiné classique, Loïc Rausenberger s’inspire également de l’étiopathie : cette pratique repose sur une analyse plus systémique du corps humain, qui s’attache aux causes des problèmes articulaires ou musculaires, autant qu’aux symptômes, par « un travail de fond au niveau postural ». C’est grâce à son côté multicarte qu’il a pu déceler, à l’aide de la joueuse anglaise dont il s’occupait après un match, une rupture partielle du quadriceps : « Ça faisait un mois qu’elle jouait avec cette douleur à la cuisse. Elle m’explique ce qu’elle ressent tandis que je l’examine. » Une échographie confirme dans la foulée sa crainte. « J’ai fait mon possible, sur le coup, dans le cadre du tournoi, mais je lui ai conseillé de voir un spécialiste dès son retour en Angleterre. Quelques semaines plus tard, j’ai reçu un mail dans lequel elle me remerciait de lui avoir fait prendre conscience du problème. Elle a consulté et, depuis, me tient au courant de son retour progressif sur les courts. »

Il doit, également, intervenir sur le court en plein match, « un acte d’urgence », lorsqu’un des joueurs le sollicitent pour un problème physique : il a alors 30 secondes pour déterminer rapidement la réalité du souci, auquel cas il demande 1 minute et demie de plus à l’arbitre de chaise pour manipuler l’athlète sur le court. « L’année dernière, j’ai été appelé quatre fois sur tout le tournoi, le plus souvent après un faux mouvement. Sur le circuit professionnel, il arrive que certains joueurs y voient un moyen de stopper le match pour reprendre leur souffle ou couper la dynamique adverse, mais dans ce tournoi, l’enjeu collectif prime et les sportifs vont au bout d’eux-mêmes. La meilleure récompense, c’est qu’ils puissent terminer le tournoi dans les meilleures conditions. » Les tournois sportifs reposent autant sur le jeu et le spectacle proposé sur les courts que sur ces « hommes de l’ombre » qui travaillent hors de la lumière, tout comme les ramasseurs de balle ou tout le corps arbitral. Et le milieu sportif a besoin de ces kinés qui savent mettre des mots sur les maux.

 

Denis Couvelard